Luca Cambiaso
Moneglia, 1527 – San Lorenzo de El Escorial, 1585
Le Christ en gloire et Dieu le père, vers 1560
Plume et encre brune, lavis brun, sur quatre feuilles assemblées
453 x 710 mm
Luca Cambiaso est le plus célèbre des artistes génois du XVIe siècle. Il débute comme apprenti auprès de son père Giovanni, a certainement vu les fresques de Perino de Vaga, Marciano Calvi, Antonio Brea et Pordenone ainsi que l’œuvre de Giulio Romano à l’église Saint Stefano et ses premières œuvres s’inscrivent dans le mouvement maniériste local. Dans les années 1540, il se rend à Rome et à Parme pour y étudier les fresques de Raphaël, Michel-Ange, Corrège et Parmesan. Son style s’inspire alors nettement des formes michelangelesques qui apparaissent dans ses premières fresques exécutées avec son père au Palazzo della Prefettura en 1547-1548. Cependant la production artistique de Cambiaso ne se limite pas à la peinture murale, il exécute de nombreuses peintures religieuses ou profanes, pour une clientèle privée ou ecclésiastique. Sa technique de la plume et du lavis, qu’il pratique beaucoup à la fin de sa vie, se rapproche étroitement de celle de Granello.
Notre feuille, représentant Le Christ en gloire et Dieu le père, entourés de cercles concentriques d’angelots, fait partie d’un ensemble de feuilles datées des années 1560 où la production graphique de Cambiaso atteint un niveau extrêmement raffiné. Dans cette feuille d’un format exceptionnellement important réalisé en assemblant plusieurs feuilles de papier, Cambiaso réalise un chef-d’œuvre synthétique où l’importance accordée à l’étude de la perspective se fond avec la force du trait épais de la plume qui répond à la volonté de saisir les formes dans leur individualité. Le rapport équilibré entre les figures et l’espace, la mise en raccourci et la force des gestes représentent l’aboutissement des recherches de l’artiste sur la figure humaine. On remarque également dans certains détails, comme la cuisse du Christ, la schématisation au travers de volumes stéréométriques qui simplifient les muscles et les articulations, nouveau type de style que Cambiaso va développer dans les années successives pour arriver à la géométrisation des figures.
On retrouve la figure du Christ ou de Dieu le père surplombant une scène religieuse dans différents dessins de l’artiste comme dans une Conversion de saint Paul conservée aux Offices à Florence (inv. 13777) ou une Annonciation du musée du Louvre (inv. 9207). Mais, par la taille et l’ampleur de la composition, notre dessin doit surtout être comparé à La Lapidation de saint Etienne, conservée au SzeÌpmuÌveÌszeti MuÌzeum de Budapest et dont la partie supérieure présente les mêmes dimensions que notre feuille (inv. 1799). Ces deux dessins, celui de Budapest et le nôtre, seraient donc les deux plus grands feuilles connues de Cambiaso.
Nous remercions Mme Mary Newcome Schleier (†) qui nous a aimablement confirmé l’attribution de ce dessin et nous a généreusement fourni des éléments précieux pour la rédaction de cette notice.