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Jean-Baptiste Vanmour

Valenciennes, 1671 – Constantinople, 1737

 

Femmes turques allant au bain, vers 1710

 

Huile sur toile

32,5 x 25 cm

Annotation ancienne au verso du châssis : Femmes turques allant au bain

 

 

Né à Valenciennes en 1671, les origines provinciales de Vanmour auraient pu le confiner à une existence modeste dans sa ville natale, si son départ en 1699 pour Constantinople n’était venu bouleverser la donne. Là, Vanmour devint « peintre du Roy et en Levant », travaillant pour les ambassadeurs français et européens qui se succédèrent dans la capitale ottomane jusqu’à sa mort en 1737. L’artiste passe l’essentiel de sa vie à Constantinople, actuelle Istanbul, et cette caractéristique le distingue de la plupart des artistes qui, depuis le XVIe siècle, ne firent souvent que de courts séjours dans la capitale ottomane. Celle-ci comptait alors environ 600 000 habitants et était de taille comparable à Londres ou à Paris. Cité éminemment cosmopolite, elle mêlait Turcs, Grecs, Juifs, Albanais, Hongrois, Roumains, Bulgares, Tartares, Arméniens, Persans, Indiens, Arabes, Berbères ou Africains, autant de communautés représentées par Vanmour. Constantinople constituait par ailleurs au XVIIIe siècle une importante zone d’échanges diplomatiques et la plupart des gouvernements européens possédaient un représentant dans la ville. Durant cette période, le pouvoir est exercé par le sultan éclairé Ahmed III (1703-1730), dans un climat de prospérité favorable au développement des arts. Cela permit à un artiste comme Vanmour, bien intégré dans la société ottomane, d’accéder aux fêtes et aux cérémonies les plus privées.

 

L’œuvre de Vanmour atteste de l’attachement pittoresque de l’artiste à la société ottomane, qu’il prend plaisir à dépeindre à tous les niveaux : de la cour du sultan aux plus humbles membres de l’Empire ottoman, des grands dignitaires religieux ou militaires aux petits métiers de la rue. On retrouve ces différents sujets dans la centaine de tableaux, aujourd’hui disparus, que Vanmour exécuta autour de 1707-1708 pour son premier protecteur, le comte Charles de Ferriol, ambassadeur de France auprès de la Sublime Porte (vers 1652-1722). Ces œuvres furent gravées vers 1712-1713 et constituent les planches du Recueil de cent estampes représentant différentes nations du Levant, dit Recueil Ferriol, qui scella la postérité de Vanmour. La planche 62 de cette publication (fig. 1) nous montre la « Femme d’un Franc allant au bain », accompagnée de sa servante. L’attitude de deux personnages est tout à fait similaire à celle de nos Femmes turques allant au bain, même si la nationalité des dames est probablement différente : avec sa tête couverte, notre femme est plus probablement turque, ainsi que l’établit l’indication ancienne portée au verso. Elle est suivie de sa servante noire portant les effets de rechange. Les deux femmes sont dans la rue et derrière elles s’ouvrent porte et fenêtres. Le format de notre tableau est de 32,5 x 25 cm, soit exactement les dimensions des œuvres autographes de l’artiste, ainsi que l’a récemment déterminé Stephen Gopin[1]. On retrouve ici la main de Vanmour, souple, délicate, usant d’une palette de coloris subtils, d’un modelé fin et d’un clair-obscur maîtrisé. Fournissant une multitude de détails minutieux, cette toile constitue un témoignage visuel et ethnographique essentiel. C’est autant pour ce caractère documentaire que pour leur pouvoir de séduction exotique que les créations de Vanmour captivent encore aujourd’hui autant d’amateurs.

 


[1] S. Gopin et M. Eidelberg, « Jean Baptiste Vanmour (1671-1737), Peintre ordinaire du Roy et en Levant », Les Cahiers d’Histoire de l’Art, n°7, 2009, p. 28-29 ; sous la direcction de S. Gopin, Jean-Baptiste, peintre de la Sublime porte, Valenciennes, 2009-2010, p. 37-47.



 
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