Lazzaro Tavarone
Gênes, 1556 – 1641
L’Apothéose de la Paix, vers 1610-1620
Plume et encre brune, lavis brun, traces de mise au carreau
234 x 199 mm
Annoté indistinctement en bas à gauche
Né à Gênes en 1556 dans une famille modeste, Tavarone entre jeune dans l’atelier de Luca Cambiaso, le plus important peintre de la scène artistique génoise de la deuxième moitié du XVIe siècle. Devenu proche de son maître, il le suit en Espagne en 1583 quand celui-ci est appelé sur les chantiers royaux et participe ainsi à la décoration de l’Escorial (Salle du chapitre, Galerie des batailles). De retour dans sa cité natale en 1594, il se fait particulièrement remarquer comme fresquiste. Au cours des trois premières décennies du XVIIe siècle, l’intense activité de Tavarone se manifeste notamment à Gênes dans l’exécution de cycles picturaux destinés à embellir de nombreux édifices religieux, comme S. Antonio in Sarzano (1600), la cathédrale S. Lorenzo (1622-1624) ou Ss. Nazario e Celso di Multedo (1634) mais aussi de nombreux palais patriciens comme le palais Grimaldi (vers 1610, actuel siège de la Galleria nazionale di Palazzo Spinola) ou le palais Cattaneo Adorno sur la strada Nuova (1624).
Au centre de notre composition, la Paix, la tête ceinte d’une couronne de laurier, est entourée d’une sarabande de sept putti illustrant les vertus catholiques selon les directives que Cesare Ripa a donné dans son Iconologia (Rome, 1593). De droite à gauche, chaque ange porte un emblème illustrant ces vertus : un poids pour la Tempérance, un miroir pour la Prudence, des mains jointes en prière pour la Foi, une balance et une épée pour la Justice, une ancre pour l’Espérance, une colonne pour la Force et un petit bol pour la Charité. Dans le fond, on distingue une figure masculine accompagnée d’un aigle (Jupiter ?) et une assemblée de dieux antiques. Ce mélange assez original d’iconographies chrétienne et antique pouvait convenir à l’exaltation des hauts faits d’une grande famille génoise : Tavarone a réalisé à plusieurs reprises ce genre de décor comme l’histoire d’Alexandre Farnèse à la villa Saluzzo Bombrini (Il Paradiso) ou l’histoire de la famille Grimaldi au palais Spinola. Par ailleurs, le format quasiment carré de notre dessin pourrait s’adapter à une composition destinée à la partie centrale d’un plafond. On retrouve ici le style très reconnaissable de Tavarone : s’il est fortement marqué par l’art de Luca Cambiaso, il est aussi caractérisé par un style énergique et sûr, un trait épais à la plume et des draperies larges et anguleuses. Tous ces traits sont particulièrement marqués dans les figures des putti tenant les emblèmes de vertus qui peuvent ainsi être rapprochés de ceux présents dans le Couronnement de la Vierge conservé au Palazzo Rosso à Gênes[1].
Nous remercions M. Piero Boccardo qui nous a aimablement confirmé l’attribution de ce dessin et nous a fourni généreusement de précieux éléments pour la rédaction de cette notice.
[1] P. Boccardo et M. Priarone, Lazzaro Tavarone (1556-1641), « La vera regola di ben dissegnare », Gênes, Palazzo Rosso, 2009, n°5, p. 16-17.