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Jean-Antoine Julien dit Julien de Parme

Cavigliano, 1736 – Paris, 1799

 

Petit garçon en costume « à la matelot », accoudé à une chaise, 1780

 

Sanguine

340 x 208 mm

Signé en bas à droite : J.D.P. et daté en bas à gauche : 27 février 1780

 

D’origine italienne, Jean-Antoine Julien fait ses premières classes auprès des maîtres du Tessin helvétique, sa région natale. Dans l’espoir de compléter sa formation, il s’installe à Paris entre 1747 et 1759, où il fait la rencontre de C. Van Loo et de Slodtz. Il part ensuite pour Rome où il bénéficie, dès 1760, d’une pension accordée par les Bourbons de Parme - d’où son surnom - et de la protection de Guillaume Du Tillot, Premier ministre de la cour qui l’engage à peindre chaque année un tableau pour les collections du duché. C’est aussi à cette période qu’il rencontre le peintre belge Corneille Lens avec lequel il se lie d’amitié et dont les œuvres ne cesseront de l’inspirer. En 1773, Julien suit son protecteur Du Tillot à Paris qui y décède l’année d’après. Il prend alors son surnom et bénéficie de la protection de nouveaux mécènes, le duc de Nivernais, le prince de Ligne. En France, rongé par la mélancolie, il n’a qu’un rêve, celui de retrouver Rome et le grand goût. Incompris de l’Académie Royale, qui rejette sa candidature en 1780, il lui a été toute sa vie reproché d’être inféodé au style de Mengs et de Raphaël. Grand collectionneur de dessins, dont un certain nombre ont été achetés à la vente Mariette de 1775, sa vie nous est aujourd’hui connue grâce à une autobiographie, publiée en 1984, qui relate un parcours fait d’itinérance et de conviction[1].

 

Au XVIIIe siècle, les garçons portent d’abord la robe de bébé, avant de revêtir l’habit masculin adulte constitué de la redingote, de la culotte et des bas. Mais, vers 1780, sous l’influence conjuguée de l’anglomanie et des théories nouvelles sur l’éduction plus « naturelle » des enfants, diffusées par Emile ou De l’éducation de Jean-Jacques Rousseau, le vêtement des enfants se fait plus simple, pratique et confortable. On habille ainsi les garçons entre 3 et 7 ans du costume dit à la matelot. Celui-ci est constitué d’un frac ou d’une veste droite d’où sort une collerette plissée et surtout, ce qui constitue une grande nouveauté, d’un pantalon long à pont, alors seulement porté par les gens du peuple et de la mer – d’où son nom : à la matelot ou encore à la marinière. Blanc ou de teinte pastel, ce costume peut être en taffetas de soie ou en toile de coton. Une large ceinture, souvent en satin, drape la taille assez haute. En France, la reine Marie-Antoinette est une des premières à l’adopter pour vêtir le premier Dauphin, Louis-Joseph-Xavier, dès 1781 (Ecole française du XVIIIe siècle (anciennement attribué à Elisabeth-Louise Vigée-Lebrun), Portrait d’enfant jouant au yoyo ou Portrait dit du Dauphin Louis-Charles, Auxerre, musée Leblanc-Duvernoy) et dès lors ce costume devient la tenue classique d’une enfance aristocratique entre 1790 et 1830. Le costume à la matelot est l’ancêtre direct de l’autre grand succès de la mode enfantine, le costume marin, qui apparaît en France vers 1850.

 

Notre sanguine représente un enfant d’environ sept ans, vêtu de ce costume mais sans la ceinture, accoudé sur une chaise. Sa tête est ornée d’un bonnet, que l’on porte facilement hiver comme été, même à l’intérieur. Le pantalon, dont le pont descend assez bas, a de nombreuses fronces d’aisance à l’arrière, ce qui donne l’impression que notre enfant a un fessier volumineux ! Signée et datée du 27 février 1780, soit au tout début de la mode du costume à la matelot, notre sanguine illustre à merveille la sûreté de la main de Julien de Parme et l’adresse de l’artiste à fixer des impressions fugitives. Elle peut être rapprochée d’autres dessins de l’artiste comme cette Jeune élégante conservée au musée des Beaux-Arts d’Orléans[2]. Le style net et précis de dessin, l’élégance de son trait, font de cette feuille l’une des plus étonnantes de l’artiste.

 

Nous remercions Mme Viviane Le Houëdec qui nous a fourni des éléments précieux sur l’histoire du costume à la matelot (https://les8petites8mains.blogspot.com).

 


[1] Histoire de Julien de Parme racontée par lui-même in P. Rosenberg, « Julien de Parme, 1736-1799 », Quaderni di Parma per l’arte, III-3, 1997.

[2] Sous la direction de P. Rosenberg, Julien de Parme, 1736-1799, Rancate, 1999-2000, n°71, p. 147.



 
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